Lettre III

Nuit d'insomnie... Je repense aux tiennes. Toi qui ne dormais quasiment jamais.

Un jour je t'ai demandé comment tu pouvais ainsi tenir, avec à peine quelques heures de sommeil par jour. Tu m'as répondu "mais je passe ma vie à dormir! Quand je fais la manche, quand je me défonce...quand ils me défoncent. J'ai même pas à fermer les yeux, juste à pas être concerné... C'est facile"

Tu es en train de te rouler une clope, je tombe de fatigue, je m'accroche à tes gestes pour ne pas sombrer... à tes mots, à ton corps. Tu t'es battu il y a quelques jours. Je ne sais plus à quel propos, la rue n'en a pas toujours besoin de toute façon. Il y a sur ton bras nu une longue estafilade rouge, encore boursouflée....

..."juste à pas être concerné"... Je me demande où est planquée ton âme. Qui au dessus ou en dessous de toi a construit ce dédale...

Et ton corps?... Ton corps qui l'entend encore sous l'anesthésie que tu généralises? Il suffirait de ne pas écouter pour le faire taire?...

Et même, même si c'était vrai, où vont ses silences...

Ta langue glisse sur le papier cigarette, tes lèvres dansent.
..."C'est quand je les ferme que je me réveille..mais je me supporte pas. J'suis trop laid quand y a plus que moi à voir...quand y a plus d'excuses à tout ça"... Ta main trace une grand arc dans le ciel, comme un sourire, puis se pose sur ma joue "dors un peu toi, tu as mauvaise mine".

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