(Absence I)

Je crois qu'ils ne partent jamais vraiment ceux qui s'en vont sans nous. La douleur qu'ils nous laissent c'est encore leurs mains nous promettant les griffures profondes de notre accouchement au monde. Ils greffent à nos peaux des appendices en formes de cerceaux qui vont tirant sur nos coutures faire craquer les épidermes de trop. Leurs absences nous dessinent des contours trop larges où, de ce que nous sommes à ce qu'elles offrent, se fait chaque jour un peu plus béante la marge. C'est sur elle qu'on jettera le grappin qui nous évadera des reflets toujours faussement lointains. Comme un collier laissé trop lâche sur le cou nous obligerait à mesurer sans cesse l'air qu'il nous reste, nos absences et manques nous condamnent à faire de l'espace déserté par leurs âmes notre toujours prochaine aire de « je », nous condamnent à grandir jusqu'à eux. Et nous sommes là, au centre de la sphère, à nous agiter et rayonner sans trêve espérant un jour, enfin, rattraper ces contours qui nous dispersent.

Alors ils ne partent pas, non, ceux qui s'en vont, ils nous laissent leur vide pour dérouler toutes nos saisons.

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